Cette comédie qui s’appelle à l’origine « Not now Darling ! » a été créée en France par Jean Poiret et Michel Serrault en 1969 et reprise de nombreuses fois dans le monde par de prestigieux comédiens. Son auteur Ray Cooney est un phénomène rare dans le paysage théâtral ! On a souvent estimé qu’il aurait perpétué le style de Georges Feydeau… En effet Cooney réinvente ce que l’on appelle le vaudeville – comique de situation, adultères et portes qui claquent – mais comme Feydeau, il nous raconte aussi la faiblesse de l’être, la lâcheté masculine, l’impulsivité féminine, l’éphémérité du désir, l’opportunisme social, et que le genre humain est imprévisible et déroutant. Jean Anouilh disait : « Avec des effets énormes, des rencontres que rien ne justifie, et des mots, toujours des mots, à la place des sentiments et des pensées : il n’y a que les vaudevilles qui soient tragiques et qui ressemblent à la vraie vie ! ». Car comme dans la tragédie, les personnages boulevardiers sont victimes d’une situation terrible, qu’ils ne maitrisent pas. Dès le lever du rideau la catastrophe arrive et va dégénérer tout au long de la pièce. Sur une intrigue futile, ces héros pathétiques vont frôler la démence. Cet auteur témoigne de l’égarement de ses contemporains, mais avec une légèreté ludique ; il dénonce les ravages du fantasme charnel le plus débridé, mais avec une élégance « So British ». Les situations sont excessives, radicales, légèrement au-dessus de la réalité ; c’est comme si on assistait à un concentré de ce qu’il peut nous arriver de pire… Et cela nous fait rire ! Ce genre de théâtre demande un jeu survolté et psychotique. C’est la poésie burlesque de Sébastien Castro (grand spécialiste de Ray Cooney) qui m’a convaincu d’incarner cette pièce délirante ; accompagnés d’un distribution virtuose et dans une esthétique « seventies » et onirique, nous allons tout faire pour essayer de vous divertir, ce qui est assez noble, puisque divertir veut dire « s’éloigner du réel et emmener ailleurs » !

Michel FAU