Un barrage contre le Pacifique

Marguerite Duras, dans Un barrage contre le Pacifique, nous raconte une histoire inspirée par sa propre enfance passée en Indochine, celle d’une famille française qui tente désespérément de s’installer dans un pays qui lui est plutôt hostile. Enfant, Duras passe sa vie aux côtés de ses deux frères et mène une existence démunie. Sa mère institutrice fait l’acquisition d’une petite concession au Cambodge inondée six mois de l’année par la mer. La terre se révèle parfaitement incultivable, car la mère « ignorait qu’il fallait soudoyer les agents du cadastre pour avoir une terre cultivable ». Un barrage est le roman qui la révèle ; il s’articule autour du personnage de la mère qui, d’institutrice devient pianiste dans un cinéma et économise sou à sou pour acquérir une concession à cultiver et avoir quelque chose à transmettre à ses enfants. Anne Consigny a décidé d’adapter et d’interpréter ce roman qui l’a « marquée pour la vie » et plus particulièrement elle choisit l’angle du destin de la mère. Au-delà de s’approprier pour mieux nous faire entendre cette langue incomparable et aussitôt reconnaissable, son acte politique, c’est de faire entendre le destin de cette femme inconnue. L’essentiel de sa proposition est bien dans l’interprétation qui nous est offerte de ce destin modelé par la fatalité. Voilà pourquoi elle joue tous les rôles, passant en moins d’une seconde de l’un à l’autre.